14 avril 2019

Impact du transfert de permis de construire sur la qualité de redevable des taxes d’urbanisme

L’essentiel:

Le transfert de permis de construire emporte transfert de la qualité de redevable.

Le Conseil d’État rappelle que les personnes tenues solidairement au paiement de la taxe, qu’il s’agisse de l’ancienne taxe locale d’équipement ou de la taxe d’aménagement depuis le 1er janvier 2011, ne peuvent avoir la qualité de redevable, de sorte que les titres de perception ne peuvent être établis à leur nom.

Sous le régime de la taxe d’aménagement, le transfert de permis de construire n’emporte plus maintien d’une solidarité au paiement de la taxe entre les titulaires successifs du permis de construire. Un mécanisme de dégrèvement permet par ailleurs d’obtenir le dégrèvement, ou le remboursement si la taxe a déjà été versée, au profit du bénéficiaire initial.

La taxe locale d’équipement, supprimée par la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010, n’a pas encore totalement cessé de faire parler d’elle, ainsi qu’en témoigne la décision du Conseil d’État en date du 11 janvier 2019 (CE 9ème et 10ème ch. Réunies, 11 janvier 2019, req. n° 407313)

Cette affaire est l’occasion de rappeler les conditions dans lesquelles le transfert d’un permis de construire, total ou partiel, impacte la qualité de redevable :

  • de l’ancienne taxe locale d’équipement (TLE)
  • de la taxe d’aménagement (TA) en vigueur depuis le 1er janvier 2011.

1°) S’agissant de l’ancienne TLE, les titulaires successifs de l’autorisation étaient tenus solidairement au paiement de la TLE conformément à l’article 1929 4°.

Ainsi, en cas de transfert du permis de construire, et dans le cas où une fraction au moins de la taxe reste exigible à la date du transfert, le nouveau bénéficiaire devenait certes redevable de la taxe, mais le titulaire initial restait tenu solidairement à son paiement.

Il s’ensuit que, lorsqu’un titre de perception avait été émis avant le transfert de l’autorisation, le redevable initial perdait, dans la mesure où une fraction au moins de la taxe restait exigible à la date du transfert, sa qualité de débiteur légal pour acquérir celle de personne tenue solidairement au paiement de la taxe en vertu des dispositions précitées du 4 de l’article 1929 du code général des impôts, le redevable de la taxe étant désormais, à cette hauteur, le bénéficiaire du transfert.

En l’espèce, la société SARL IMEO s’était vue délivrer un permis de construire par un arrêté du maire le 29 juin 2011. La société a alors été assujettie à la TLE par titre de recette émis le 5 septembre 2011, à raison des constructions autorisées.

Le 22 décembre 2011, elle a obtenu un permis de construire modificatif.

Par un arrêté, du 22 février 2012, les permis de construire (PC et PCM) ont été transférés à la SCCV SOLANGA.

Postérieurement à ce transfert, le titre de perception correspondant à la TLE a été établi à l’encontre de la SARL IMEO.

Les deux sociétés ont alors demandé la décharge de la TLE. Le tribunal administratif de la Réunion a rejeté leurs demandes, motif pris de la solidarité de la SARL IMEO avec la SCCV SOLANGA.

Ces dernières se sont alors pourvues en cassation.

Faisant application du principe précité qu’il dégage, le Conseil d’État a rappelé que, le titre de perception ne peut être émis qu’à l’encontre du redevable de la taxe c’est à dire le bénéficiaire du transfert.

Ainsi, les titres de perception ne pouvaient être régulièrement émis au nom du bénéficiaire initial.

Le Conseil d’État rappelle ainsi que la solidarité ne permet pas d’établir les titres de perception au nom de la personne tenue solidairement au paiement de la taxe.

Il ne peut être poursuivi que pour le recouvrement de la taxe, émise à titre principal à l’encontre du redevable légal.

2°) Cette décision n’est plus d’actualité pour ce qui concerne la taxe d’aménagement puisqu’il n’est plus prévu de solidarité entre les titulaires successifs d’une autorisation d’urbanisme (articles L. 331-25 et L. 331-26 du code de l’urbanisme).

Seuls les établissements garants de l’achèvement de la construction, et les époux et partenaires liés par un pacte civil de solidarité demeurent solidaires du paiement de la taxe d’aménagement. La présente jurisprudence trouvera donc à s’appliquer à ces hypothèses spécifiques.

S’agissant des cas de transfert de permis de construire, un titre d’annulation doit désormais être émis au profit du redevable initial, et un nouveau titre émis au nom du nouveau bénéficiaire de l’autorisation.

Si une première tranche de la taxe a déjà été versée par le titulaire initial, celui-ci a droit à s’en voir rembourser, et un nouveau titre doit être émis à l’égard du nouveau bénéficiaire, et ce quand bien même le produit de la taxe aurait déjà été réparti entre les différentes collectivités bénéficiaires.

Ce système, plus simple pour les opérateurs, permet au bénéficiaire initial de ne pas provisionner le montant de la TA une fois le permis transféré.